Le fauvisme
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Le fauvisme

Apr 19, 2023

Le fauvisme


Les débuts du fauvisme


Dans les premières années du XXe siècle, les peintres post-impressionnistes travaillant en France, tels que Van Gogh, Gauguin, Seurat et Cézanne, étaient considérés comme des chefs de file de l'art d'avant-garde. Leurs expériences collectives en matière d'application de la peinture, de sujets, de lignes expressives et de couleurs pures ont favorisé l'émergence du fauvisme. Le symbolisme, qui met l'accent sur la vision intérieure de l'artiste, est une autre influence importante. D'autre part, la réévaluation par les Européens de la sculpture africaine en tant qu'art et non en tant que curiosité anthropologique a introduit de nouvelles idées de forme et de représentation chez les modernistes européens.


Matisse, pionnier du fauvisme


Henri Matisse est généralement considéré comme le principal artiste fondateur du fauvisme. Comme beaucoup de ses contemporains, Matisse a été très influencé par l'enseignement de Moreau selon lequel l'expression personnelle est l'un des attributs les plus importants d'un grand peintre. Les techniques et le langage visuel systématique du pointillisme, dont ses compatriotes Georges Seurat, Paul Signac et Henri-Edmond Cross avaient été les fers de lance, revêtaient également une importance considérable pour le jeune Matisse. Bien que Matisse n'ait pas appliqué la théorie pointilliste directement à ses propres œuvres, l'application de minuscules points de peinture de différentes couleurs pour créer un ton visuel harmonieux le fascine. Son observation de cette technique l'a amené à développer la "structure de la couleur", c'est-à-dire de grands aplats de couleur qui créent un effet décoratif délibéré et un sentiment d'ambiance. Il est également très sensible à l'œuvre post-impressionniste de Paul Gauguin, Pierre Bonnard et Édouard Vuillard, dont l'intégration de couleurs solides et de motifs s'éloigne de l'effet vacillant et momentané de la peinture impressionniste.

Synthétisant toutes ces idées, Matisse abandonne les teintes subtiles des peintures mixtes et commence à travailler avec des couleurs vives, directement tirées du tube, comme moyen de transmettre des émotions. Il travaille en plein air depuis le milieu des années 1890 et ses voyages en Corse et dans le sud de la France en 1898 renforcent son intérêt pour les effets de la lumière naturelle. Un été passé aux côtés de Signac et de Cross à Saint-Tropez, sur la Côte d'Azur, en 1904, lui donne une nouvelle occasion d'observer leurs techniques.


Les compagnons fauves : Derain et de Vlaminck


Au cours des mêmes années que les premières expériences de Matisse avec les techniques post-impressionnistes, les deux peintres André Derain et Maurice de Vlaminck se rencontrent en 1901 et commencent à partager un atelier à Chatou, dans la banlieue ouest de Paris. Travaillant en étroite collaboration, ils développent leur nouvel intérêt mutuel pour les couleurs vives et les coups de pinceau directionnels.

Henri Matisse: Luxe, Calme et Volupte (1904)

Henri Matisse: Luxe, Calme et Volupte (1904)

Matisse rencontre Derain en 1899, et deux ans plus tard, par l'intermédiaire de Derain, il rencontre de Vlaminck. En tant qu'artiste plus âgé et mieux établi, il soutient et encourage ces deux âmes sœurs, les présentant même à des marchands potentiels. En 1905, Matisse visite l'atelier de Chatou, où il est fortement impressionné par l'utilisation de la couleur pure par de Vlaminck. Matisse invite Derain à passer l'été 1905 avec lui à Collioure, une ville portuaire et de pêche située sur la côte sud de la France. Les deux hommes passent cet été décisif à travailler et à affiner leurs styles et leurs techniques, produisant de nombreuses peintures significatives au cours d'une période cruciale de quatre mois de collaboration.


Le Salon d'automne de 1905


Plus tard dans l'année, le Salon d'Automne se tient au Grand Palais à Paris. Matisse, Derain et de Vlaminck y exposent toutes leurs œuvres, rejoints par d'autres anciens élèves de Moreau, dont Henri Manguin et Albert Marquet. Les peintures exposées se distinguent par l'utilisation de couleurs vives et saturées et d'un travail au pinceau spontané. L'exposition comprenait également un buste sculptural d'apparence plus traditionnelle d'Albert Marque, et la proximité de cette figure avec les peintures aux couleurs criardes et à l'exécution énergique a incité le critique Louis Vauxcelles à décrire la scène comme "Donatello parmi les fauves". Le terme "Fauves" a ainsi été inventé pour désigner ces artistes ; bien que péjoratif dans son contexte d'origine, il a perduré.


Le fauvisme : Concepts, styles et tendances


Un cercle qui s'élargit


Malgré l'hostilité initiale des critiques, de nombreux Fauves ont connu un succès commercial à la suite de l'exposition du Salon d'automne de 1905. Leur art est présenté lors d'autres expositions organisées au cours des années suivantes, notamment au Salon des Indépendants en 1907, où l'attraction principale est une grande salle baptisée "Le repaire des Fauves". Entre-temps, d'autres artistes commencent à rejoindre le trio central composé de Matisse, Derain et de Vlaminck. Le groupe des Fauves qui s'agrandit (tous basés en France) comprend finalement Othon Friesz, Georges Rouault (un autre élève de Gustave Moreau), Kees van Dongen, Georges Braque et Raoul Dufy. Ces artistes voyagent ensemble, partagent leurs ateliers et échangent librement leurs idées pendant la brève période d'apogée du fauvisme.

Maurice de Vlaminck : La Seine à Chatou (1906)

Maurice de Vlaminck : La Seine à Chatou (1906)

La primauté de la couleur


Tous les Fauves étaient intensément préoccupés par la couleur comme moyen d'expression personnelle. La couleur et la combinaison des couleurs constituent le sujet, la forme et le rythme intrinsèques de leur travail. Un ciel peut être orange, un arbre peut être bleu, un visage peut être une combinaison de couleurs apparemment opposées ; le résultat final est un produit totalement indépendant de la perception de l'artiste, plutôt qu'une représentation fidèle de la forme physique originale. En outre, les éléments de la composition étaient construits par le placement des couleurs, plutôt que par des systèmes perspectifs ou des dessins.

André Derain: Pinède à Cassis (Landscape) (1907)

André Derain: Pinède à Cassis  (1907)

Sujet et style


Dans leur préoccupation commune pour l'expression par la couleur et la forme, ces artistes étaient généralement moins préoccupés par la nouveauté de leur sujet. Alors que les impressionnistes et les postimpressionnistes avaient dépeint des scènes de la vie moderne et urbaine, telles que les boulevards, les cafés et les salles de concert de Paris, les fauves ont pris pour point de départ des sujets plus traditionnels. Leurs sujets s'inspirent du monde qui les entoure et comprennent des portraits, des paysages, des marines et des personnages dans des intérieurs, mais l'impact visuel de la composition des couleurs prime sur toute narration ou symbolisme possible. Au contraire, ils utilisaient leurs sujets comme des véhicules pour les actes d'observation et de peinture, avec leur coup de pinceau actif et leurs couleurs non naturalistes comme moyens d'entraîner le spectateur dans leurs voyages intérieurs et créatifs.

Henri Matisse: Le Bonheur de Vivre (1905-06)

Henri Matisse: Le Bonheur de Vivre (1905-06)

Développements ultérieurs - Après le fauvisme


La tendance des Fauves à déformer les formes et les couleurs afin d'exprimer des sensations intérieures a fortement influencé les Expressionnistes, dont le mouvement artistique s'est avéré beaucoup plus durable et plus cohérent. Les expressionnistes allemands, menés par des artistes comme Ernst Ludwig Kirchner et Karl Schmidt-Rottluff, ont fait un usage tout aussi agressif de la couleur dans leurs scènes de rue berlinoises animées et leurs portraits souvent grotesques.

Othon Friesz: Paysage à La Ciotat (1907)

Othon Friesz: Paysage à La Ciotat (1907)

Cézanne et le cubisme


D'une certaine manière, la disparition du fauvisme peut également être attribuée à un regain d'intérêt pour Cézanne. L'exposition Cézanne organisée à Paris en 1907 pas Ambroise Vollard a ravivé l'intérêt pour l'œuvre de l'artiste, en particulier pour l'importance qu'il accorde à l'ordre et à la structure naturels. Georges Braque, par exemple, commence à privilégier une palette de couleurs plus restreinte, se concentrant davantage sur les gradations subtiles de la couleur et de l'échelle. Cette approche a conduit Braque à remplir ses toiles d'une abondance de formes à la fois encombrée et soigneusement ordonnée, comme dans son œuvre de 1908, Route près de l'Estaque, qui est indubitablement un précurseur crucial du développement du style cubiste par l'artiste.

Georges Braque: Le Viaduc à L'Estaque (1908)

Georges Braque:Le Viaduc à L'Estaque (1908)


L'art africain


Autre croisement intéressant à cette époque, les cercles des Fauves et de Pablo Picasso s'intéressent tous deux à l'art africain. Les voyages de Matisse en Algérie lui ont permis d'acquérir de nouvelles idées sur la couleur et le motif, qui ont fait surface dans des œuvres comme La ligne verte (Portrait de Madame Matisse) (1905) et Nu bleu (Souvenir de Biskra) (1907), dont les traits radicalement simplifiés et les membres anguleux s'inspirent de la sculpture africaine. Cette utilisation de sources artistiques non occidentales a également eu une profonde influence sur le jeune Picasso, qui a commencé à incorporer des masques africains et ibériques dans ses propres œuvres, notamment dans un certain nombre d'autoportraits et dans l'œuvre emblématique Les Demoiselles d'Avignon (1907).

 

Henri Matisse: La Danse (1910)

Henri Matisse: La Danse (1910)

En 1908, les Fauves s'aventurent chacun dans une direction différente : Braque commence à développer le cubisme aux côtés de Picasso, Derain flirte brièvement avec le cubisme et de Vlaminck assombrit sa palette et ses sujets. Entre-temps, d'autres artistes du groupe, tels que Marquet, Dufy et Rouault, ont commencé à travailler dans d'autres styles.


Les suites de l'histoire

Henri Matisse : L'atelier rouge (1911)

Henri Matisse : L'atelier rouge (1911)

En fin de compte, les Fauves se sont réunis pour un épisode court mais très important, plutôt que pour une école entièrement définie. Bien qu'ils n'aient jamais produit de manifeste de groupe décrivant leurs objectifs artistiques, les "Notes d'un peintre" de Matisse, écrites en 1908, formalisent nombre de leurs préoccupations et objectifs communs, notamment leur engagement en faveur de l'expression personnelle et de l'instinct individuel, leur utilisation de la couleur en tant qu'élément visuel indépendant ayant un effet émotionnel, et leur réflexion sur la composition en tant que surface picturale. Même après la dissolution du groupe, presque aussitôt qu'il a reçu son infâme surnom, les idées et les œuvres phares du fauvisme continueront d'influencer l'art pendant des décennies.

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